Danilette a publié une analyse (que je vous invite à lire sur son blog) par le Dr Mordechaï Kedar de la situation des Kurdes et le dilemme de la Turquie vis à vis la crise en Syrie.
L'extrait concerne la situation des Kurdes.
Le Dr Mordechai Kedar ( Mordechai.Kedar @ biu.ac.il ) est un chercheur israélien de l'arabe et de l'islam, il est professeur à l'Université Bar-Ilan et directeur du Centre pour l'étude du Moyen-Orient et de l'Islam (en formation), Bar Ilan, Israël. Il se spécialise dans l'idéologie islamique et des mouvements, le discours politique des pays arabes, les médias arabes, et les affaires domestiques syriennes.
"Le printemps kurde a commencé il y a vingt-deux ans lorsqu’on a imposé à Saddam Hussein une zone d’exclusion aérienne sur la région kurde de l’Irak. Les cieux affranchis d’ennemis ont permis aux Kurdes de développer des dispositifs sociaux et politiques qui ont créé le Kurdistan irakien indépendant avec son drapeau, ses partis politiques, ses média, des élections, un parlement, un gouvernement, un système économique et surtout les « Peshmergas » soldats téméraires qui protègent les accomplissements kurdes. Le Kurdistan irakien profite depuis de nombreuses années de son indépendance sous le parrainage des États-Unis, au grand dam de la Turquie. En effet, le Kurdistan irakien est devenu une base pour l’organisation, la formation et l’armement du « Parti des Travailleurs du Kurdistan », le PKK, qui conduit une guerre sanglante contre le gouvernement turc.
L’indépendance que le Kurdistan irakien a réussi concrètement à mettre en œuvre, en particulier depuis la chute de Saddam Hussein en 2003, a encouragé et incité les Kurdes de Turquie à lutter aussi pour leur indépendance. La dégradation du fonctionnement du gouvernement syrien depuis mars 2011 a conduit à l’idée d’indépendance chez les Kurdes de Syrie qui vivent pour la plupart dans la région de Hasaké dans le nord est du pays qui est proche du Kurdistan irakien et kurde.
Au cours des derniers mois, beaucoup de Kurdes sont passé de Syrie en Irak pour s’entraîner et s’organiser en unité de combat dans des camps de l’armée kurde (des Peshmergas) pour ensuite retourner en Syrie protéger leurs familles. Lorsque les Kurdes syriens aussi réaliseront leurs rêves de liberté, alors Erdogan devra faire face à trois fronts kurdes, en Irak, en Syrie et chez lui en Turquie. Il désire la chute d’Assad tout en négligeant ce qui se passe déjà sur le terrain : le fractionnement de la Syrie et l’éclosion d’un nouveau Kurdistan, syrien celui-là.
La Turquie fournit une aide aux rebelles syriens mais Assad, pour se venger, aide les Kurdes turcs du PKK qui se révoltent contre Erdogan. En retour, les combattants de la résistance kurde participent avec l’armée syrienne aux durs combats d'Alep, et l’alliance entre Assad et le PKK est aux yeux des Kurdes de Syrie une horreur.
..."L’économie turque est en chute avec les investissements étrangers en baisse et une forte inflation ; l’Europe en crise achète moins de produits fabriqués en Turquie et le marché arabe n’existe plus. L’Iran fournit du pétrole et du gaz à la Turquie mais les tensions entre les deux pays menacent leurs relations économiques. Le besoin en énergie pousse les dirigeants turcs à faire pression sur Israël et sur Chypre pour qu’ils l’incluent dans le partage des réserves de gaz en Méditerranée mais l’Europe ne soutient pas cette demande turque. Quant aux relations entre la Turquie et l’OTAN, il y a des ombres : la Turquie n’a pas encore oublié ni pardonné à l’Europe son refus de l’accepter dans l’Union Européenne mais avec du recul cela lui a évité de devoir participer à l’aide économique à la Grèce. La Turquie n’aide pas l’OTAN en ce qui concerne le problème afghan comme elle n’avait pas aidé les pays occidentaux à envahir l’Irak en 2003.
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