Malgré le fait que les yeux du monde sont rivés sur la Syrie et, par extension, sur la Turquie, pays voisin qui a un rôle à jouer dans la détermination de l'issue de la guerre civile syrienne, Recep Tayyip Erdogan, a réussi à orchestrer un coup d'Etat politique aux proportions épiques en plongeant son peuple dans la guerre civile alors que l'OTAN regardait ailleurs.
Ce que M. Erdogan a fait, en l'espace de seulement trois mois, est d'annuler le résultat des élections démocratiques en faisant obstruction à la formation d'un gouvernement de coalition afin d'appeler de nouvelles élections. Puis il a lancé une campagne militaire contre le PKK, sachant très bien que si suffisamment de gens sont tués entre maintenant et le scrutin de Novembre, la perception négative du public du PKK se traduira probablement à la baisse du vote pour le le parti Kurde HDP, qui était en partie responsable de la perte de la majorité parlementaire de l'AKP en Juin.
Tout cela avait été permis parce que Erdogan a ouvert la base aérienne d'Incirlik aux USA en échange de l'accord tacite de l'OTAN à l'extermination de l'opposition kurde en Turquie.
Dès mardi, cet accord a conduit à:
1) des centaines de morts
2)l'arrestation de journalistes
4 ) aucun progrès sensible dans la «lutte» contre ISIS qui a été le prétexte de cet accord tacite.
Pour tous ceux qui en ont besoin d'une preuve supplémentaire que M. Erdogan ne s’arrêtera pas tant ce que son opposition politique pro-kurde n'est complètement laminée, lisez donc cet entrefilet qui rapporte que «une foule de plusieurs milliers de personnes" mis le siège à Ankara HDP sur le feu, l'envoi de fonctionnaires du parti fuyant "sur les toits." Voici l'histoire:
"Ces campagnes d'attaques sont pilotées d'une seule main, celle de l'Etat", a accusé mercredi devant la presse le coprésident du HDP Selahattin Demirtas.
De la fumée s’élevait du bâtiment, selon un photographe de l’AFP, et les manifestants ont finalement été dispersés par la police. Des photos publiées sur des réseaux sociaux suggèrent que l’intérieur du bâtiment a été sérieusement endommagé par l’attaque et que plusieurs bureaux ont été ravagés par les flammes.
Les bureaux du parti pro-kurde HDP attaqués dans 9 villes de Turquie
126 succursales de cette formation pro-kurde, membre du gouvernement de transition, ont été prises pour cible hier soir. Ces attaques, sans doute coordonnées par des nationalistes,
Et il n'y avait pas que des bureaux du HDP, des organes de presse, critiques d'Erdogan, ont été attaqués eux aussi, Hurriyet (qui, comme indiqué ci-dessus, a été assiégée par des manifestants pendant deux jours consécutifs) rapporte que les entreprises kurdes ont été incendiées:
... environ 150 personnes ont mis le feu à quatre magasins appartenant à des hommes d'affaires kurdes, selon les médias turcs.L'incendie, qui a détruit les quatre magasins, a été éteint par les pompiers, sans faire de victimes.
Ensuite, il y a ce compte rendu assez déconcertant de protestations à Beypazar (?) :
Pendant ce temps, une manifestation anti-terroriste dans le district d'Ankara de Beypazar du 7 septembre s'est transformé en une tentative de lynchage contre les travailleurs saisonniers kurdes, blessant 27 personnes.La police a arrêté neuf manifestants à Beypazar , qui est à moins d'une heure de route à Ankara et est considéré comme l'un des lieux touristiques les plus populaires de la capitale.Environ 500 personnes étaient rassemblées dans le centre de Beypazar pour protester contre l'assassinat de 16 soldats par le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) dans la province sud-est de Hakkari. Le groupe marchait à travers la ville, scandant des slogans contre le PKK. La route de la manifestation a amené le groupe dans le quartier Zafer du quartier, qui est principalement peuplé par des travailleurs saisonniers kurdes.Des manifestants ont dit que certains habitants du quartier Zafer ont jeté des pierres sur la manifestation, la foule a commencé à attaquer les maisons où vivent des citoyens kurdes.Certains d'entre eux ont aussi essayé de mettre le feu maisons et des voitures dans la région.
Voici quelques photos du chaos:
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Donc dans l'ensemble, juste un autre jour dans un paradis démocratique dirigé par un despote soutenu par les USA.
Nous allons terminer avec l'extrait suivant d'un résumé du WSJ du nouveau plan de l'Europe à faire face aux flux de demandeurs d'asile du Moyen-Orient:
La Commission européenne propose de mettre la Turquie sur une liste de "pays d'origine sûrs»,qui va accélérer le rapatriement des gens à qui on a refusé l'asile.